Figueres, le 23 Février 2015
Aujourd'uhi une nouvelle exposition temporaire a été ouverte au Théâtre-Musée Dalí de Figueres, entitulée Quoi de neuf? -Vélasquez à la Salle des Loggias, salles qui ont été renouvellées.
La présentation à la presse à été conduite par Antoni Pitxot, directeur du musée, et Montse Aguer, directrice du Centre Études Daliniennes.
LE DISCOURS DE L'EXPOSITION
Depuis 1988, la Salle des loggias a été consacrée à l'œuvre tardive de Salvador Dalí. Rappelons qu'à partir des années 60, la pensée créative du peintre est axée, avant tout, sur les questions scientifiques et la récupération des grands classiques de peinture. Ce présupposé a été maintenu avec le réaménagement, mais le contenu de l'exposition a été étoffé.
La Salle des loggias est désormais divisée en trois espaces :
Dans le premier sont exposées les œuvres des années 60-70, où abondent les appareils stéréoscopiques et les illusions d'optique. En font partie les œuvres suivantes : La structure de l'ADN (vers 1975-76), Sardane pentagonale (1978-79) et L'harmonie des sphères (1979). Y sont également exposées des œuvres de grand format : 50 tableaux abstraits qui, à deux mètres de distance, se transforment en trois Lénine déguisés en chinois et, à six mètres, dessinent la tête d'un tigre royal (1962) ; Quand ça tombe, ça tombe (1972-73) ; Aurore, midi, soir et crépuscule (1979) et À la recherche de la quatrième dimension (1979).
Ces pièces constituent un prolongement de la salle précédente, où sont présentées d'autres stéréoscopies et expériences optiques - comme l'anamorphose et l'holographie. Outre qu'il représente remarquablement les toiles daliniennes de cette période, l'ensemble illustre l'intérêt de l'artiste pour tout ce qui touche la perception visuelle et ses paradoxes.
Le second est connu sous le nom de Tour des énigmes. Il a été repeint dans un ton plus clair et les conditions d'accès en ont été améliorées. Dès aujourd'hui, y est exposé le diorama Babaouo de 1932, une des œuvres du peintre liées au scénario homonyme dont il est l'auteur.
Le troisième espace accueille temporairement le dialogue créatif qu'entretenait Dalí avec l'œuvre de Diego Rodríguez de Silva y Velázquez (1599-1660), un des classiques de l'histoire de l'art. Il permet de vérifier l'intérêt de Dalí pour son art intemporel. L'exposition, que nous avons intitulée Quoi de neuf ? Vélasquez se compose de onze toiles exécutées entre 1960 et 1982. Dalí réinterprète certaines œuvres du peintre sévillan, dont la plupart appartiennent aux fonds du Museo del Prado, de Madrid : L'infante Marguerite d'Autriche (vers 1665, attribuée aujourd'hui à Juan Bautista Martínez del Mazo), Le bouffon Calabacillas (1635-39), Le bouffon Don Sebastián de Morra (1643-49) et Les Ménines ou la famille de Philippe IV (1656). Dalí s'inspire également de l'huile Christ et l'âme chrétienne (1628-29) appartenant à la collection de la National Gallery de Londres.
L'influence du peintre sévillan se renforce avec le Buste de Vélasquez se métamorphosant en trois personnages en train de discuter (habituellement exposé dans la Salle Palais du vent). À l'endroit qu'occupait auparavant ce buste, il y a maintenant une composition inédite de Dalí (vers 1982) réalisée à partir des couvertures d'un livre consacré à Vélasquez (Enrique Lafuente, Velazquez, Phaidon, Oxford University Press, Londres, New York, 1943).
Rappelons également que la présence de Vélasquez au Théâtre-musée ne s'arrête pas là. Près de l'atelier de la Salle Palais du vent, on peut contempler l'hologramme Holos ! Holos ! Vélasquez ! Gabor ! Sachant que l'intérêt de Dalí pour l'holographie traduit la quête d'un réalisme esthétique, il n'est guère étonnant que Les Ménines et son auteur aient été la matière de la première expérience du peintre avec cette technique.
Quoi de neuf ? Vélasquez
Le titre de cette exposition temporaire est tiré du texte de 1976, Eureka, où Salvador Dalí affirme ceci : « Depuis l'impressionnisme, toute l'histoire de l'art moderne est axée sur un seul et unique objectif : la réalité. Ce qui peut nous faire dire : Quoi de neuf ? Vélasquez ».
L'intérêt du peintre de Figueres pour le maître de l'art baroque n'est pas une nouveauté. Il remonte à loin. Vélasquez est en fait l'un des « Grands maîtres de la peinture » à propos desquels Dalí écrit déjà dans la revue scolaire Studium, en 1919. Et cette fascination persistera au fil du temps : la maison de Portlligat contient un portrait de Vélasquez - qui fait partie d'une galerie de personnages à moustache - et, sur un des murs de l'atelier, on peut contempler une reproduction quadrillée des Ménines, témoignage du travail quotidien du peintre.
La passion pour Vélasquez est également évidente dans le traité de Dalí 50 secrets magiques (1948), où le Sévillan n'est devancé que par Vermeer dans un tableau comparatif que dresse Dalí. Mais c'est surtout à partir des années 50 que cette présence et cette influence se multiplient et deviennent manifestes dans les écrits comme les œuvres du peintre de l'Empordà.
Bien entendu, Dalí appréciait l'habitude qu'avait Vélasquez de se représenter sur les lieux du tableau, en train de le peindre. À son époque surréaliste, son ambition consistait à matérialiser avec grande précision les images de l'irrationalité concrète, affirmant que les moyens d'expression picturale devaient être mis au service de cette question. Dans La conquête de l'irrationnel, Dalí affirme : « [...] à mesure que les images de l'irrationalité concrète s'approchent du réel phénoménique, les moyens d'expression correspondants s'approchent de ceux de la grande peinture réaliste, - Vélasquez et Vermeer de Delft, - peindre réalistiquement d'après la pensée irrationnelle, d'après l'imagination inconnue ».
Des années plus tard, le peintre reliera sa théorie de la mystique nucléaire au traitement de la forme et de la couleur chez Vélasquez. C'est toutefois le naturalisme du peintre sévillan qui, avec insistance, devient l'un des points de référence de l'artiste de l'Empordà. Vélasquez est une constante dans son œuvre : il apparaît chaque fois que Dalí envisage une nouvelle étape, un pas en avant dans son parcours artistique, dans le domaine de la composition comme du conceptuel.
LE RÉAMÉNAGEMENT ARCHITECTURAL
Le réaménagement de la Salle des loggias, qui contient l'exposition temporaire Quoi de neuf ? Vélasquez, est l'œuvre de Pep Canaleta de 3carme33 pour la conception et la rénovation architecturale, et d'Àlex Gifreu en ce qui concerne le graphisme.
La première intervention a consisté à remplacer le revêtement de sol afin d'en neutraliser la présence. La couleur retenue, un ton terre, allège l'espace et permet d'axer l'attention du visiteur sur les murs.
Les travaux ont également comporté la construction d'un mur afin d'agrandir l'espace d'exposition, de délimiter la grande salle, de raccourcir la distance entre le spectateur et les œuvres et de réduire la sensation de vide central.
Une troisième intervention a permis de rouvrir un ancien passage afin de créer un parcours circulaire à travers les espaces sans que le visiteur ait à rebrousser chemin. On peut ainsi flâner au gré des différentes pièces de l'édifice, à travers de très hauts passages à arc en plein cintre. Les nouvelles ouvertures ont été percées dans le respect du style d'architecture existant.
Pour chaque nouvel espace, une couleur différente a été retenue : blanc neutre pour ceux contenant les œuvres attirant le plus d'affluence ; couleur Galatea, parfaitement assortie au sol de carrelage ancien qui a été conservé, et un ton cendré. Les améliorations apportées à l'éclairage ont également contribué à renforcer cette restructuration.
En dernier lieu, nous avons reconçu la sortie vers le patio et la base de l'escalier conduisant à la boutique a été adaptée et revêtue de neuf.