Púbol, le 10 Mars, 2017
L'exposition temporelle du Château de Púbol avec par titre Salvador Dalí, Gala, Ricardo Sans, a été inauguré aujourd'hui par le Président du Gouvernement de Catalogne, M. Carles Puigdemont. En représentation de la Fondation Dalí, a assisté à la cérémonie la directrice des Musées Dalí, Montse Aguer.
La visite commentée de l'installation a été assurée par Rosa M. Maurell et Cuca R. Costa, coordinatrices du Centre d'Études Daliniennes et commissaires de cette exposition, sous la direction scientifique de Montse Aguer. L'exposition a la collaboration de la Fondation Bancaire "La Caixa" et, en son nom, le conseiller de la direction générale, Higini Clotas et aussi Quim Macià, directeur des institutions de la direction territoriale Catalogne de CaixaBank, et Isabel Salgado, directrice du département des expositions d'art ont aussi été présents à la cérémonie d'ouverture, ainsi que le gérant de la Fondation, Joan Manuel Sevillano.
Cette année, l'exposition temporaire de Púbol est consacrée à la relation photographique de Dalí, Gala et Ricardo Sans Condeminas entre les années 1949 et 1956. On montre 90 photos et différents documents.
Contexte
La Fondation Dalí a acheté à la famille du photographe Ricardo Sans le fonds qui a un rapport avec Salvador Dalí et Gala qui comprend plus de 900 images, dont la Fondation va aussi gérer les droits. Ce fonds enrichent la collection de la Fondation Dalí qui maintenant a environ 13.500 photographies. C'est une collection très hétérogène qui recouvre différentes époques de la vie du peintre et renferme des clichés d'artistes de renommée internationale comme Man Ray, Brassaï, Cecil Beaton, Eric Schaal, Philippe Halsman et Horst P. Horst, ou de photographes de rayonnement local comme, entre autres, Juan Gyenes, Francesc Català Roca ou Ricardo Sans.
Objet et contenu de l'exposition
L'exposition que nous présentons cette année au Château de Púbol Salvador Dalí, Gala, Ricardo Sans, montre un large éventail de ce fonds, peu connu, de Ricardo Sans. Nous avons organisé l'installation en quatre espaces, par ordre chronologique, qui obéissent eux-mêmes à un ordre chronologique - présidés par un écran sur lequel une sélection des photos. On voit deux lettres, trois livres et deux articles qui ont un rapport avec le photographe et le peintre.
Nous découvrirons un artiste et un fonds photographique qui permettent, une fois encore, de mieux appréhender la vie et l'œuvre de Dalí et Gala, à la lumière, cette fois, du regard porté par un être proche, en qui le couple avait confiance et qui a su saisir des instants intimes devenus pérennes et universels.
Signalons, par ailleurs, que Dalí a conservé dans ses affaires personnelles 164 photographies de Ricardo Sans. 9 d'entre elles ont été sélectionnées par Gala pour prendre place dans le dressing de Portlligat.
Qui fût Ricardo Sans?
Ricardo Sans Condeminas (Barcelone, 1911-1972), entreprit des études de droit, avant d'entrer dans un cabinet d'avocats barcelonais. Mais la guerre mit un terme à l'exercice de cette profession. Passionné d'électronique, il ouvrit alors, en compagnie d'un associé, une boutique de postes de radios qu'il réparait lui-même. À cette époque, il fut aussi professeur de droit à l'Escola de la Marina Mercant de la Mediterrània (l'Ecole de la Marine Marchande de Méditerranée) de Barcelone. Une fois la guerre achevée, il épousa Mercedes Camps Mas-Bagà et se consacra à l'électronique, aux appareils haute-fidélité, à la radio et à la télévision. Le monde des arts le passionnait. Il était féru de musique - c'était un fervent wagnérien - et de photographie. Il prétendait d'ailleurs qu'il faisait des photos parce qu'il ne savait pas peindre. Il portait une grande admiration aux portraits du photographe canadien d'origine arménienne, Yousuf Karsh. Ce n'est qu'après la guerre que Ricardo Sans s'attelle sérieusement à la pratique de la photographie. En 1939, il fait l'acquisition d'un Leica et commence à photographier de façon plus professionnelle.
Il convient de citer quelques photographies où apparaissent des personnalités de l'époque : le violoniste Francesc Costa, le violoniste de Singapour Goh Soon Tioe, le compositeur Eduard Toldrà, le baryton Raimundo Torres ou encore Pau Casals et Fritz Kreisler lors du dernier concert au Palau de la Música en 1936. En 1947, Sans remporte le 3ème prix du concours de photographie de l'AFC (le Groupement Photographique de Catalogne) et, en 1952, il est membre du jury du concours Ciutat de Barcelona (Ville de Barcelone).
Le fond photographique comprend environ 20.000 photographies.
L'amitié avec Dalí
C'est par l'intermédiaire d'amis communs - Gonçal Serraclara et José Luis Beltran - qu'en 1949, Sans fait la connaissance de Dalí. Dans cette occasion, Sans réalise son primer reportage au peintre et prend la photo à couleur qui sera utilisée en couverture de l'édition espagnole du livre 50 secrets magiques de 1951.
Au printemps 1950, les travaux de l'atelier de Portlligat sont achevés. À compter de 1951, Ricardo Sans documente ce nouvel espace dans lequel Dalí et Gala lui servent de modèles. Il réalise aussi de magnifiques portraits de l'artiste dans son espace de travail, au milieu des toiles auxquelles il travaille à cette époque comme le Christ de Saint Jean de la Croix, La Madone de Portlligat, Galatée aux Sphères, L'Ange de Portlligat, Christ hypercubique, Portrait de Gala aux symptômes rhinocérontiques, etc. Dans la création dalinienne, ces œuvres marquent une nouvelle étape : celle de la peinture mystique nucléaire, une production qui allie science et religion, influencée par l'explosion atomique, le retour vers les classiques et le traité de Luca Pacioli intitulé De la Divine Proportion.
Espaces de l'exposition
Les photographies sélectionnées à l'occasion de cette exposition se répartissent en quatre catégories : Portraits de Dalí 1949-1956, Portraits de Gala 1951-1953, Portraits de Dalí et Gala 1951-1954 et Portlligat 1950-1956.
Sur les clichés que Sans réalise chaque année de 1949 à 1956, Dalí cesse d'être ce personnage médiatique qui aime à se donner en spectacle. On y voit un Dalí plus familier, plus spontané, presque toujours photographié chez lui, dans son intimité, plus complice ou plus détendu face à l'objectif. Le photographe s'attache à photographier Dalí dans son environnement quotidien : une série de portraits le montre en train de manger des oursins ; d'autres images de la collection attestent que le peintre a plus d'une fois partagé sa table avec le photographe.
Les portraits de Sans sont étudiés, cadrés avec soin et toujours servis par la lumière naturelle de Portlligat - à quelques exceptions près, les photos sont prises de jour et en extérieur -. Les clichés du fonds photographique Sans sont en grande partie consacrés aux Dalí dans leur lieu de vie.
L'espace suivant est consacré aux portraits de Gala. Sans semble être parvenu à faire en sorte que son modèle se sente à l'aise. Face à l'objectif de Sans, Gala est sereine et la plupart des clichés la montrent souriante, détendue, naturelle et surtout, fait exceptionnel, prenant la pose pour le photographe. Ces photos de Gala sont inédites.
Le troisième espace de cette exposition est consacré aux images montrant Salvador Dalí en compagnie de Gala. Sans photographie les Dalí dans leur vie quotidienne et dans l'environnement qui leur est familier. Ces clichés laissent donc apparaître l'image d'un couple uni et affectueux. On y voit souvent l'intérieur de la maison : la bibliothèque, la salle à manger, l'atelier, la chambre à coucher, mais aussi les magnifiques espaces extérieurs de Portlligat.
Parmi les travaux les plus artistiques que les deux hommes ont réalisés ensemble figure une série de photographies à double exposition, dans le style qui plaisait tant aux Surréalistes. La photo où l'on voit Dalí et Gala dans la cour et la photo avec Dalí assis dans la cheminée de la salle à manger ont été réalisées selon ce procédé.
Le dernier espace de cette exposition s'intéresse au lieu qui sert de cadre à la plupart des photographies ici présentées : la maison de Portlligat. Au fil du temps, elle évolue au gré des indications que les Dalí transmettent à leur constructeur et ami, Emili Puignau. Dalí griffonne d'ailleurs régulièrement des notes ou des croquis destinés au constructeur sur les photographies de Sans qui montrent la maison et qui témoignent de son évolution. Ces images annotées revêtent un grand intérêt car elles permettent de mieux cerner les attentes de Dalí quant aux modifications architecturales opérées dans la maison.
Signalons une lettre de Dalí dans laquelle le peintre dessine les mains et les pieds de Gala en précisant au photographe le cadrage souhaité. Ces images lui serviront ensuite de modèles pour peindre Assumpta corpusculaire Lapis-lazuline.
Plusieurs photos de Dalí signées Ricardo Sans ont été publiées dans des monographies comme Dalí al desnudo, Dalí, la vie d'un grand excèntriques, Salvador Dalí y sus enemigos, Dalí fotógrafo, Dalí en sus fotógrafos et ont servi à illustrer divers articles de magazines comme Look Magazine, Nouveau Femina ou Blanco y Negro.
Portlligat constitue, pour tout artiste, un cadre éminemment inspirant et Sans a su saisir la lumière et l'énergie du lieu. En procédant de façon méthodique, nous avons pu dater avec exactitude chacune des photographies de cette production.
Montage
Le montage de cette exposition est l'œuvre de Pep Canaleta de 3carme33 et le graphisme, d'Alex Gifreu.
Dans la salle aux couleurs de la Méditerranée de Portlligat, nous avons souhaité montrer ces images à la manière d'un album de photographies ouvert, avec sa couverture et ses pages intérieures.
Un écran de verre et un écrin de projection envahissent un coin de la salle et montrent des documents qui font le contexte des images et des expériences des trois protagonistes de l'album : Dalí, Gala et Sans.
Catalogue
Le catalogue inclut des textes de Montse Aguer, directrice des Musées Dalí, de Rosa M. Maurell et de Cuca R. Costa, coordinatrices du Centre Études Daliniens et commissaires de l'exposition, ainsi que d'Elisabet Sans, petite-fille du photographe.
Le catalogue a été dessiné par Alex Gifreu et il bénéficie du parrainage de "la Caixa".
L'exposition Salvador Dalí, Gala, Ricardo Sans sera visible du 15 Mars, jour de l'ouverture du Château de Púbol, jusqu'au 7 Janvier 2018.